Brexit sans conséquence pour la Suisse…pour l’instant
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Le Brexit préoccupera l’Europe encore longtemps et ses retombées à long terme sont encore imprévisibles. En ce qui concerne les entreprises exportatrices suisses, selon une enquête du KOF, les conséquences immédiates sont pour l’instant négligeables. La position de la Suisse vis-à-vis de l’UE n’a toutefois sûrement pas été améliorée par le Brexit.
Le Brexit – ou du moins l’intention annoncée des Britanniques de quitter l’UE – est aujourd’hui réalité. Mais dans la mesure où sa mise en œuvre concrète et le contenu des accords qui suivront entre le Royaume-Uni et l’UE sont encore totalement ouverts, il est encore quasiment impossible d’en chiffrer avec précision les conséquences économiques.
Pourtant, le Brexit influence d’ores et déjà l’économie réelle. D’une part, l’issue du scrutin a eu des incidences directes sur des données économiques telles que le taux de change, par exemple. D’autre part, il a assombri les perspectives économiques des consommateurs et des producteurs britanniques. En même temps, la dépréciation de la livre devrait accroître la demande en produits provenant d’Outre-Manche et amortir ainsi d’éventuelles répercussions économiques négatives au Royaume-Uni. Les attentes révisées à la baisse et le regain d’incertitude qui en découle devraient toutefois globalement susciter une plus grande réserve en terme de consommation et d’ investissements et compenser les gains de change.
Les conséquences immédiates du Brexit pour l’évolution économique des autres pays de l’UE ne sont pas encore claires. D’un côté, la dépréciation de la livre devrait provoquer des pertes de chiffre d’affaires dans les entreprises ayant une grande part de leurs débouchés au Royaume-Uni. De l’autre, plusieurs villes et régions de l’UE s’efforcent de tirer profit du Brexit. La place financière londonienne devrait perdre de son attrait, et les entreprises financières désireuses de la quitter sont déjà activement courtisées. De plus, l’intérêt s’est déjà manifesté pour les institutions européennes implantées au Royaume-Uni, comme l’Agence européenne des médicaments (EMA), par exemple.
Deux canaux de répercussions
En Suisse, les incidences du Brexit devraient se répercuter de deux manières différentes. D’une part, la sortie de l’UE rendra plus difficile le commerce avec le Royaume-Uni, du moins tant que les relations commerciales entre la Suisse et le Royaume-Uni ne sont pas définies par un nouvel accord. Cela devrait affecter en premier lieu les entreprises ayant des relations commerciales directes. D’autre part, le Brexit devrait avoir des répercussions indirectes en Suisse. Il est à supposer qu’il a détérioré la position de négociation de la Suisse vis-à-vis de l’UE par rapport à la mise en œuvre de l’initiative sur l’immigration de masse. Il semble difficile d’imaginer que, dans l’optique des négociations sans doute tendues avec le Royaume-Uni, l’UE soit prête à accorder des concessions à un pays tiers au sujet d’un de ses principes fondamentaux, la liberté de circulation des personnes. Les revendications liées à l’initiative sur l’immigration de masse ne sont pas compatibles avec l’accord de libre circulation des personnes conclu entre la Suisse et l’UE, et sa mise en œuvre équivaut à une rupture de contrat par la Suisse. Le Brexit a sans doute accru la probabilité que l’UE réagira à une rupture de contrat par une résiliation de l’accord. Comme l’accord de libre circulation des personnes est lié par une clause guillotine aux autres accords bilatéraux II, cela signifie que la résiliation d’un accord rendra caduc l’ensemble des accords bilatéraux II.
Enquête auprès des entreprises suisses
Afin d’examiner de plus près les répercussions potentielles du Brexit en Suisse, le KOF a recensé en juillet la part des exportations de l’UE et du Royaume-Uni des entreprises participant à l’enquête conjoncturelle. Les parts d’exportations ont été estimées chez les entreprises de l’industrie de transformation et du secteur financier ainsi que chez les autres prestataires de services. Les entreprises de ces secteurs d’activité devraient être les plus affectées par le Brexit. Les parts d’exportation permettent de déterminer les entreprises qui entretiennent des relations commerciales particulièrement étroites avec le Royaume-Uni. Les entreprises ont ensuite été réparties en deux groupes, à savoir les entreprises exposées (forte part d’exportation) et non exposées (faible part).
La ligne bleue du graphique G 3 indique l’évolution dans le temps des attentes des entreprises en matière de demande. La ligne rouge représente les attentes des entreprises réalisant plus de 5% de leur chiffre d’affaires au Royaume-Uni. A cet égard, les attentes de ces entreprises étroitement liées au Royaume-Uni ont davantage fléchi que celles des autres entreprises en juillet, lors de la première enquête suivant le Brexit. Le nombre des entreprises exportant au Royaume-Uni est toutefois réduit par rapport à l’ensemble des entreprises, ce qui rend la courbe rouge un peu plus volatile. Le mouvement plus net à la baisse de juillet reste dans la norme des mouvements observés dans le passé et ne signifie pas forcément une plus vive réaction des entreprises exposées. Par ailleurs, aucune tendance divergente ne peut être constatée à l’intérieur des deux groupes.
Le graphique G 4 s’attache à identifier d’éventuelles répercussions liées à la dégradation du statut de négociateur de la Suisse par rapport à l’UE. Il répartit les entreprises en deux groupes : celles qui réalisent plus de 5% de leur chiffre d’affaires dans l’UE (hors Royaume-Uni) et celles qui desservent exclusivement le marché suisse. Tout comme sur la figure 1, la figure 2 ne présente aucun indice suggérant des incidences négatives sur les attentes à court terme des entreprises suisses.
L’analyse descriptive des résultats de l’enquête montre que l’onde de choc du Brexit n’a pas (encore) atteint les entreprises suisses. Aucune conséquence majeure n’est donc à attendre en Suisse à court terme. Les incidences à long terme dépendent de trop nombreuses éventualités pour que l’on puisse tirer des conclusions définitives.
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