« Le conflit commercial occulte actuellement tout le reste »
L'indicateur de la situation des affaires du KOF dans le secteur privé en Suisse a de nouveau baissé en avril. Il enregistre ainsi son troisième recul consécutif. Les attentes des entreprises pour les six prochains continuent sur leur lancée : celles-ci sont revues à la baisse pour le troisième mois consécutif.
En résumé
La situation des affaires s'est refroidie en avril, en particulier dans le secteur des autres services et chez les prestataires de services financiers et d'assurance.
De nombreuses entreprises reviennent sur leurs prévisions pour les mois à venir.
Le conflit tariffaire est la principale source d'incertitude et entraîne une réticence à investir. Les entreprises sont également devenues plus restrictives dans leurs prévisions en matière d'emploi. Dans l'ensemble, aucune augmentation des effectifs n'est prévue pour les trois prochains mois.
Le climat conjoncturel suisse se rafraichit de plus en plus. « Ce vent froid provient du contexte international. Le conflit commercial est devenu au fil de l’année de plus en plus pesant.», explique Klaus Abberger, responsable de la section enquêtes conjoncturelles. « L'incertitude est telle que la plupart des entreprises préfèrent attendre avant d'investir dans de nouvelles machines ou d'embaucher du personnel », poursuit M. Abberger.
Les rebonds espérés concernant les programmes d'investissement publics prévus en Allemagne et dans d'autres pays européens sont également passés au second plan. « En mars, on ressentait encore plus d'optimisme à cet égard. Mais tout est actuellement occulté par le conflit commercial. » Les droits de douane de 31 % qui menacent les exportations pèsent comme une épée de Damoclès sur l'économie suisse. « Les entreprises ne s'attendaient sans doute pas à être moins bien traitées que l'Union européenne. »
Selon M. Abberger, l'économie intérieure se porte toutefois encore relativement bien, en particulier le commerce de détail et l'hôtellerie-restauration. Mais la vigueur de la demande intérieure s'essouffle quelque peu. « Dans le secteur des services, par exemple, les premiers signes de ralentissement sont perceptibles », ajoute M. Abberger.

«L'incertitude est telle que la plupart des entreprises préfèrent attendre avant d'investir dans de nouvelles machines ou d'embaucher du personne.»Klaus Abberger, Chef de la section Enquêtes conjoncturelles, KOF![]()
En avril, la situation des affaires se refroidit en particulier dans le secteur économique des autres services ainsi que chez les prestataires de services financiers et d'assurance. Par ailleurs, la situation des affaires est un peu moins favorable qu'auparavant dans la construction, dans le domaine des bureaux d’études et dans le commerce de détail. En revanche, l'indicateur de la situation des affaires évolue de manière légèrement positive dans l'industrie manufacturière, le commerce de gros et l'hôtellerie-restauration. La situation n'est donc pas uniforme dans tous les secteurs économiques.
Les prévisions des entreprises pour les six prochains mois présentent un schéma différent. Pour le cinquième mois consécutif déjà, les entreprises de l'industrie manufacturière adaptent leurs attentes à la baisse. En avril, pour la première fois depuis la fin de l'année 2022, le scepticisme l’emporte en termes de solde. Les entreprises des secteurs de la finance et des assurances, de la construction, de l'ingénierie, du commerce de gros et de l'hôtellerie-restauration revoient par ailleurs leurs attentes à la baisse. Seuls le commerce de détail et les autres prestataires de services sont plus confiants par rapport au mois précédent quant à l'évolution future. Néanmoins, les attentes de ces deux secteurs économiques sont plus prudentes – comparées avec celles émises au début de cette année.
Malgré l'évaluation de la situation par les entreprises, sceptiques dans l’ensemble, M. Abberger ne veut pas encore tirer un trait sur l'année, d'un point de vue conjoncturel. « L'année peut encore être positive si une solution stable est trouvée par rapport au conflit commercial et si les mesures de relance budgétaire commencent à porter leurs fruits », estime t’il. Il existe des forces cycliques fondamentales qui pourraient avoir un effet positif à partir du second semestre.
Les entreprises prévoient des augmentations salariales moins importantes que par le passé
Les entreprises prévoient une augmentation moyenne des salaires de 1,3% pour la période allant jusqu'à douze mois. Elles s'attendent ainsi à des augmentations salariales moins importantes que lors de l'enquête de janvier (1,5%) et de celle d'avril de l'année précédente (1,6%). Les entreprises de l'industrie manufacturière et de l'hôtellerie-restauration en particulier s'attendent à une augmentation plus faible qu'en janvier. Dans l'ensemble, les entreprises sont devenues plus restrictives dans leurs planifications de personnel, en solde. Aucune augmentation des effectifs n'est prévue pour les trois prochains mois. Les chiffres concernant le manque de personnel ont augmenté dans la construction et l'hôtellerie-restauration, ils sont aussi fréquents qu'au trimestre précédent dans l'industrie manufacturière et diminuent dans les autres secteurs économiques – activités financières et d'assurance, bureaux d’études, commerce de gros, autres services.
Industrie manufacturière

Dans l'industrie manufacturière, la situation des affaires actuelle est plutôt stable, mais les prévisions s'assombrissent fortement et l'incertitude est élevée. Dans l'industrie manufacturière, la situation des affaires actuelle évolue peu en avril, elle est à nouveau légèrement plus favorable qu'en mars. Cependant, les attentes pour les six prochains mois se refroidissent rapidement. Pour la première fois depuis la fin de l'année 2022, les prévisions d'activité sont à nouveau négatives en termes de solde. Les entreprises considèrent toutefois qu'il est très difficile d'évaluer l'évolution future. L'incertitude augmente une fois de plus. Les entreprises ressentent déjà une certaine retenue concernant les entrées de commandes, elles font état d'une baisse de la demande. Au cours des trois premiers mois de cette année, l'utilisation des capacités a certes légèrement augmenté, mais le taux d'utilisation est inférieur à la moyenne en comparaison à moyen terme. Dans le secteur de la chimie et de la pharmacie, le taux d'utilisation a également légèrement augmenté. Avec du recul, cette augmentation n'est toutefois apparemment pas suffisante. Les entreprises des secteurs de la chimie et de la pharmaceutique jugent leurs stocks de produits finis trop faibles, suite aux récentes turbulences politico-commerciales. Dans l'ensemble, la pénurie de produits intermédiaires et de matériaux ne joue pas actuellement un rôle important dans l'industrie manufacturière, mais les plaintes concernant les restrictions financières ont augmenté. Les entreprises signalent que leur position concurrentielle est de plus en plus sous pression, tant sur le marché intérieur que sur le marché d'exportation de l'UE et sur les marchés extérieurs. Les participants à l'enquête s'attendent à une hausse des prix d'achat, mais ils ne peuvent pas les répercuter sur leurs prix de vente. En ce qui concerne la situation de la demande dans un avenir proche, les entreprises sont plus sceptiques qu'auparavant. Les attentes en matière d'exportations s'assombrissent nettement dans l'ensemble de l'industrie manufacturière. Le scepticisme concernant l'évolution future des exportations augmente aussi bien chez les fabricants de produits intermédiaires, les producteurs de biens d'investissement que chez les fabricants de biens de consommation. En conséquence, l'industrie manufacturière dans son ensemble ne prévoit plus d'augmenter sa production. Les entreprises qui ont répondu à l’enquête après l’annonce de la suspension des droits de douane dits « réciproques » ne montrent aucun soulagement quant à la planification de la production par rapport à celles qui y ont répondu avant.
Étude de projet et construction

Dans les secteurs économiques liés à la construction, la situation des affaires s'assombrit légèrement et les attentes de la demande dans le secteur de la construction sont plus mitigées que précédemment. Dans les deux secteurs liés à l'activité de construction, à savoir les bureaux d’études et le bâtiment, l'indicateur de la situation des affaires baisse légèrement en avril. L'utilisation des capacités a certes augmenté dans le secteur de la construction, et ce dans les trois domaines (bâtiment, génie civil, second œuvre), mais elle reste globalement inférieure à la moyenne. Le second œuvre, en particulier, continue d'afficher un faible taux d'occupation. Certes, les entreprises sont à nouveau plus satisfaites de leurs carnets de commandes et leur situation bénéficiaire se stabilise, mais elles prévoient plus souvent que par le passé des diminutions de prix pour leurs prestations dans un avenir proche. En ce qui concerne l'évolution future de l'activité de construction, les attentes évoluent différemment. Les attentes s'éclaircissent nettement dans le bâtiment et légèrement dans le génie civil, alors qu'elles s'assombrissent un peu dans le second œuvre. En ce qui concerne l'évolution de la demande au cours des trois prochains mois, les tendances sont homogènes dans les trois secteurs : les attentes sont plus mitigées en avril qu’auparavant. Dans le secteur des bureaux d’études, les carnets de commandes diminue. Les montants des travaux dans le cadre de nouveaux contrats sont également plutôt en recul. Les bureaux d'études recherchent moins souvent des collaborateurs supplémentaires qu'auparavant.
Commerce de détail et commerce de gros

Dans le commerce de détail, la situation des affaires est stable, alors qu'elle est légèrement plus favorable que précédemment dans le commerce de gros ; les attentes en matière de demande sont hétérogènes. Dans le commerce de détail, la situation des affaires est stable en avril. Dans ce contexte, différentes évolutions se compensent selon la taille des entreprises. La situation des affaires se refroidit dans les petites entreprises, alors qu'elle s'améliore dans les moyennes et les grandes. Dans l'ensemble, de volume de la clientèle et les ventes de marchandises n'évoluent plus aussi défavorablement qu'auparavant. Mais cela ne permet pas de stabiliser la situation bénéficiaire qui continue de souffrir. Les participants à l'enquête s'attendent toutefois à ce que la pression à la baisse des prix s'atténue bientôt quelque peu. Les entreprises sont également plus confiantes qu'auparavant quant à l'évolution future de leur chiffre d'affaires. Dans le commerce de gros, la situation des affaires s'améliore légèrement en avril. On observe toutefois une tendance inverse dans les différents secteurs : dans le commerce de gros de biens de consommation, la situation des affaires se refroidit, alors qu'elle se détend à nouveau légèrement dans le commerce de gros de biens destinés à la production (commerce associé à la production). Les deux secteurs estiment que l'évolution de la demande sera plus prudente que jusqu'à présent. Dans les deux secteurs également, les entreprises s'attendent à des prix d'achat plus élevés, de sorte qu'elles prévoient également plus souvent des augmentations de prix dans leurs prix de vente.
Hôtellerie-restauration

Situation globalement stable dans l'hôtellerie-restauration, les ventes peinent néanmoins à décoller dans la restauration. Dans l'hôtellerie-restauration, la situation des affaires ne change pratiquement pas en avril par rapport au début du trimestre précédent. Les entreprises se montrent également modérément confiantes concernant l’évolution de leurs attentes commerciales au cours des six prochains mois. Le chiffre d'affaires se situe à peu près au niveau de l'année précédente. Dans le secteur de l'hébergement, le taux d'occupation des chambres est très élevé et la situation bénéficiaire évolue positivement. Les entreprises d'hébergement s'attendent de plus en plus à une augmentation du nombre de nuitées, les réservations pour le trimestre en cours évoluent d’ores et déjà favorablement. « Si le taux de change continue à s'apprécier, cela freinerait toutefois le tourisme », estime M. Abberger. Dans la restauration, en revanche, les ventes de plats et de boissons sont difficiles et la rentabilité reste sous pression. Les restaurateurs ne s'attendent pas à une reprise de la demande à court terme.
Secteurs financiers

Les prestataires de services financiers et d'assurance font état d'une situation commerciale moins favorable qu'auparavant et sont plus prudents quant à l'évolution future de leurs revenus. Chez les prestataires de services financiers et d'assurance, la situation commerciale continue de se refroidir en avril et l'incertitude quant à l'évolution future des affaires augmente nettement. Certes, la situation bénéficiaire s'est récemment stabilisée, mais les établissements sont plus sceptiques qu'auparavant quant à l'évolution future des revenus. Les banques s'attendent à une augmentation de la demande de leurs services, tant de la part des clients privés que des entreprises. Elles constatent une amélioration de la solvabilité de ces deux groupes de clients. En ce qui concerne les entreprises, elles s'attendent néanmoins à ce que les opérations de crédit soient moins dynamiques qu'auparavant. Alors que le résultat des opérations de commissions et des opérations de négoce avait récemment connu une évolution positive, ils s'attendent désormais à un ralentissement dans ce domaine. Les opérations d'intérêts devraient en outre continuer à avoir un impact négatif sur le compte de résultat. « Le secteur financier ressent les effets négatifs des taux d'intérêt bas. », explique M. Abberger. Les compagnies d'assurance ne s'attendent plus à une évolution positive de leurs revenus au cours des trois prochains mois. Selon les entreprises, les primes brutes devraient certes évoluer plus favorablement que jusqu'à présent au cours de ce trimestre et les paiements bruts augmenter plus faiblement. Toutefois, le scepticisme augmente en ce qui concerne l'évolution de leurs produits nets des placements.
Autres entreprises de services

Les entreprises des autres services font état d'une situation commerciale qui n'est plus aussi bonne et déplorent de plus en plus une faible demande. Pour les autres prestataires de services, la situation des affaires s'assombrit légèrement en avril. La demande de leurs services est moins dynamique que jusqu'à présent et le taux d'utilisation des capacités diminue au minimum. Le recul du taux d'utilisation des capacités est certes à peine perceptible dans l'ensemble, mais il touche tous les sous-secteurs, à savoir les transports, l'information et la communication, les services économiques et les services personnels. Le taux d'occupation reste toutefois élevé par rapport à la situation qui prévalait juste avant l'apparition de la pandémie de COVID-19. Les plaintes concernant un manque de demande augmentent toutefois et les entreprises se montrent nettement plus réticentes à recruter du personnel supplémentaire. Les agences de recrutement, par exemple, ne s'attendent plus à une augmentation de la demande pour leurs offres.
Dans l'horloge conjoncturelle du KOF (graphique G 1), l'indicateur de la situation des affaires est comparé au baromètre conjoncturel du KOF. L'indicateur de la situation des affaires reflète la situation conjoncturelle actuelle, tandis que le baromètre est un indicateur avancé de l'évolution de l'activité. L'horloge peut être divisée en quadrants : lors de la phase de reprise, la situation des affaires est inférieure à la moyenne, mais les perspectives de croissance sont supérieures à la moyenne. Pendant le pic conjoncturel, la situation et les perspectives sont supérieures à la moyenne. Pendant la phase de ralentissement, la situation est supérieure à la moyenne et les perspectives sont inférieures. Lors du creux conjoncturel, la situation et les perspectives sont inférieures à la moyenne. Idéalement, le graphique parcourt les quadrants dans le sens des aiguilles d'une montre.
Enquêtes
Les résultats des enquêtes conjoncturelles du KOF d'avril 2025 intègrent les réponses d'environ 4500 entreprises des secteurs de l'industrie manufacturière, de la construction et des principaux services. Cela correspond à un taux de réponse d'environ 59%.
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