L’économie suisse tire profit de ses activités de recherche et de développement à l’étranger

Les investissements effectués par les entreprises suisses dans la recherche et le développement (R&D) sur des sites étrangers ont enregistré une forte augmentation au cours des vingt dernières années. Ils sont aujourd’hui plus élevés que les dépenses correspondantes en Suisse. La crainte souvent exprimée que cette évolution ne soit préjudiciable à la place technologique suisse n’est pas confirmée.

F&E Schweizer Firmen im Ausland
Photo: Shutterstock

L’économie suisse est depuis longtemps fortement intégrée dans l’économie mondiale par le biais d’investissements directs à l’étranger (IDE ou « foreign direct investment », FDI). Selon les statistiques de la BNS à ce sujet, le stock constitué à l’étranger sous forme d’IDE sortants était, avec 166% du produit intérieur brut (PIB) nominal, supérieur à celui de tous les autres pays les plus avancés économiquement.

Davantage d’investissements à l’étranger qu’en Suisse

En ce qui concerne les investissements sortants (« outward FDI »), la mise en place et l’extension de canaux de distribution et d’unités de production constituent certes les premières motivations. Mais les entreprises suisses investissent aussi de plus en plus à l’étranger dans la recherche et le développement. En 2012, les dépenses en R&D du secteur privé sur des sites étrangers représentaient déjà, selon les statistiques de l’OFS, 117% des dépenses équivalentes en Suisse. Vingt ans plus tôt, en 1989, elles s’élevaient seulement à 85%. Ainsi, les entreprises suisses investissent aujourd’hui bien davantage en R&D à l’étranger qu’en Suisse (cf. tab. 1). D’après l’enquête sur l’innovation menée par le KOF en 2015, 86% des entreprises menant des activités de R&D à l’étranger effectuaient leurs investissements R&D dans l’Union européenne, 35% en Amérique du Nord (États-Unis/Canada), 9% au Japon et 33% dans d’autres pays parmi lesquels la Chine et des pays asiatiques.

La présence de l’économie suisse à l’étranger sous forme de R&D est nettement supérieure à celle de pays comparables. Ainsi, le rapport entre les activités R&D menées par la Suède (n° 2 en matière d’internationalisation des activités R&D) à l’étranger et sur le territoire national ne s’élevait en 2007 qu’à environ 50%. Certes, en Suède aussi et dans pratiquement tous les pays économiquement avancés, la part des activités R&D menées à l’étranger s’est notablement accrue au fil du temps.

La présence croissante à l’étranger est souvent interprétée comme une délocalisation de capacités R&D au détriment d’activités équivalentes dans le pays (hypothèse de substitution) et donc comme une menace pour les emplois domestiques. Il existe néanmoins des observateurs plus optimistes qui estiment, quant à eux, que l’accroissement des investissements R&D à l’étranger soutient, d’une part, la production et la vente dans les marchés ciblés et, d’autre part, dans une mesure grandissante, vise à exploiter le savoir technologique disponible sur des sites étrangers en vue d’étendre la base de savoir propre à l’entreprise. Dans cette optique, les activités R&D menées à l’étranger et en Suisse se complètent et renforcent ainsi la place technologique Suisse (« hypothèse de complémentarité ») ; à cet égard, il convient de prendre en considération non seulement les effets directs sur la société-mère, mais aussi les incidences indirectes sur l’économie nationale.

Qu’en est-il de la Suisse ?

Dans le cadre d’une nouvelle analyse, Spyros Arvanitis et Heinz Hollenstein étudient laquelle de ces deux hypothèses s’applique davantage à l’économie suisse. Il apparaît que l’économie suisse tire un profit direct de l’extension de la base de savoir des entreprises investissant à l’étranger, mais aussi indirect au travers de flux de savoirs vers d’autres entreprises suisses (retombées technologiques). Par ailleurs, les IDE en R&D accroissent les performances de l’entreprise. Ainsi les investissements axés sur le marché et les coûts augmentent la productivité de la société-mère, tandis que les activités axées sur le savoir et menées à l’étranger ont une incidence favorable sur la capacité d’innovation par rapport au marché.

La politique économique peut contribuer à ce que l’économie suisse tire encore un plus grand profit de l’imbrication internationale des activités R&D. En premier lieu, il peut s’agir de mesures destinées à accroître l’attrait de la place économique suisse pour des entreprises novatrices, indépendamment du fait que ces entreprises soient suisses ou étrangères. Cela concerne avant tout la politique en matière de recherche et de formation, la politique fiscale ainsi que la signature d’autres accords économiques, bilatéraux le cas échéant) (dérégulation des IDE entrants et sortants ; meilleure protection des brevets à l’étranger etc.). Au vu des défis conjoncturels et structurels actuels, cela semblerait d’autant plus opportun.

L’analyse détaillée de Spyros Arvanitis et de Heinz Hollenstein peut être consulté dans les dernières KOF Analysen.

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