Le Brexit et les relations commerciales : les questions centrales
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D'importantes décisions concernant le Brexit seront prises à la mi-mars. On ne sait toujours pas si le Royaume-Uni se retirera de l'UE d'une manière réglementée ou non, ou si un nouveau référendum aura lieu. En tout état de cause, la Suisse et le Royaume-Uni ont signé le 11 février un accord commercial bilatéral qui régirait les relations post-Brexit.
Cet article montre l'importance des deux pays l'un pour l'autre et dans quelle mesure ils sont liés au reste de l'UE.
Quelle est l’importance des deux pays en tant que partenaires commerciaux ?
La part des exportations suisses de biens et de services vers le Royaume-Uni s’élève respectivement à 5,7% et 7,7% de l’ensemble des exportations suisses de biens et de services (cf. T1). Le Royaume-Uni est, pour la Suisse, le sixième marché d’écoulement de ses marchandises. À l’inverse, la part des exportations britanniques de biens et de services vers la Suisse représente respectivement 2,2% et 4,5% du total des exportations britanniques de biens et de services.
Quelles marchandises transitent entre le Royaume-Uni et la Suisse ?
Le commerce des métaux précieux (or, argent etc.) est très soutenu entre la Suisse et le Royaume-Uni. 41% des exportations suisses vers le Royaume-Uni se rangent dans la catégorie des métaux précieux (cf. G1). La deuxième catégorie d’exportation (31%) concerne les produits chimiques et pharmaceutiques, suivie par l’horlogerie et les instruments de précision (10%) ainsi que les machines (7%). Au cours des dernières années, la Suisse a majoritairement enregistré un déficit commercial vis-à-vis du Royaume-Uni, ce qui s’oppose à l’excédent persistant du commerce de marchandises avec l’ensemble du monde. En valeur corrigée du commerce des métaux précieux, il en résulte toutefois un excédent du bilan du commerce de marchandises de la Suisse avec le Royaume-Uni.
Quelle est l’importance du nouvel accord commercial pour le Royaume-Uni et pour la Suisse ?
Selon les indications officielles, l’accord commercial récemment conclu entre la Suisse et le Royaume-Uni englobe environ trois quarts du volume du commerce de marchandises helvético-britannique précédemment couvert par les accords conclus entre la Suisse et l’UE. Le nouvel accord comprend, quoiqu'il en soit, les produits pharmaceutiques, importants pour la Suisse. Le Royaume-Uni ne pourra profiter que partiellement de l’accord commercial conclu avec la Suisse, car le commerce des services – en grande partie exclu de l’accord – est relativement important pour le pays en comparaison internationale. Ainsi, seules 56% de toutes les exportations sont des exportations de marchandises, et 44% portent sur les services (cf. T 2). En revanche, pour la Suisse, en incluant l’or non monétaire, le commerce des marchandises représente 72% de toutes les exportations. Sans compter l’or monétaire, cette part s’élève à 67%, contre 33% pour les services. Si l’on exclut également des composantes volatiles comme les autres objets de valeur et le commerce de transit, la part du commerce de marchandises pour la Suisse n’est que de 63%, contre 37% pour les services.
Quelle est l’importance de l’UE-27 pour le Royaume-Uni et inversement ?
L’UE-27 (l’UE sans le Royaume-Uni) est de loin le principal débouché des marchandises britanniques. Globalement, en 2017, le Royaume-Uni a exporté des marchandises dans les autres pays de l’UE pour un montant d’environ 189 milliards de francs, ce qui correspond à un bon 48% de toutes ses exportations de marchandises. Les États-Unis sont un autre partenaire commercial important (11% de toutes les exportations de marchandises) de même que la Chine (5,6%). La Chine est ainsi à peu près aussi importante pour le Royaume-Uni que l’Irlande. En valeur absolue, le Royaume-Uni est plus important pour l’UE qu’inversement. Les autres pays de l’UE ont exporté des marchandises en 2017 vers le Royaume-Uni pour un montant de 330 milliards de francs, ce qui ne correspond toutefois qu’à 7% à peine de toutes les exportations de marchandises des 27 autres pays de l’UE.
Quelle est l’importance de l’UE-27 pour la Suisse et inversement ?
L’UE est également le principal partenaire commercial de la Suisse. En 2018, la Suisse a exporté des marchandises pour un montant de 112 milliards de francs vers les 27 pays de l’UE, ce qui représente un bon 48 % de toutes ses exportations de marchandises. Autres partenaires commerciaux importants de la Suisse l’an dernier : les États-Unis (16,2% de toutes les exportations marchandises) et la Chine (5,2%). L’importance de la Suisse pour les 27 pays restants de l’UE est nettement moindre. Seulement 3% des exportations de marchandises de l’UE-27 étaient destinées à la Suisse, pour un montant de 135 milliards de francs.
Comment le Royaume-Uni a-t-il évolué sur le plan économique depuis son adhésion à l’UE en 1973 ? Et la Suisse, durant la même période ?
Le produit intérieur brut par habitant corrigé du pouvoir d’achat s’est nettement plus accru au Royaume-Uni depuis 1973 que le PIB par habitant de la Suisse (cf G.2). Dans les années 1990 en particulier, la Suisse a connu un développement économique nettement moins dynamique. Cependant, depuis le milieu des années 2000, la Suisse a davantage progressé que le Royaume-Uni. De plus, le PIB absolu de la Suisse par habitant, corrigé du pouvoir d’achat, est aujourd’hui encore presque une fois et demie supérieur à celui du Royaume-Uni.
Avec quel pays le Royaume-Uni a-t-il pu conclure des accords commerciaux depuis la décision du Brexit ? Avec combien de pays la Suisse a-t-elle des accords commerciaux à l’heure actuelle ?
En tant que pays membre de l’UE, le Royaume-Uni bénéficie des accords commerciaux conclus par l’UE avec 70 pays à l’échelle mondiale (cf. G 3). D’ici le Brexit, il doit renouveler ces accords pour continuer à avoir accès à ces marchés. Jusqu’à présent, le Royaume-Uni n’est parvenu à conclure un accord qu’avec douze pays. La Suisse a la possibilité de conclure ses propres accords commerciaux dans le monde entier. À l’heure actuelle, elle a un accord commercial avec 45 pays.
Le Royaume-Uni parviendra-t-il encore à conclure les accords commerciaux restants ?
Il est peu probable que le Royaume-Uni parvienne à renouveler tous les accords encore manquants d’ici la date de sa sortie de l’UE, si elle a bien lieu, le 29 mars. Il négocie actuellement avec une bonne trentaine de pays, parmi lesquels des partenaires commerciaux importants tels que l’Afrique du Sud, la Corée du Sud et la Norvège (cf. G 4). La conclusion d’un accord commercial avec 20 pays est très peu probable d’ici la date-butoir du Brexit. Parmi ces pays figurent le Mexique, l’Égypte et l’Ukraine. La conclusion d’un accord sera impossible d’ici le Brexit avec des partenaires commerciaux importants comme le Japon et la Turquie, qui représentent chacun près de 2% de toutes les ventes de marchandises. Globalement, après la sortie de l’UE, le Royaume-Uni devrait avoir un accès nettement réduit aux marchés mondiaux.
Quel genre de relation le Royaume-Uni et l’UE pourraient-ils entretenir à l’avenir ?
Les négociations actuelles entre l’UE et le Royaume-Uni gravitent autour des modalités de la sortie et des relations futures. Le National Institute of Economic and Social Research (NIESR), institut britannique partenaire du KOF, a condensé dans un schéma les options du Royaume-Uni en ce qui concerne ses futures relations avec l’UE : le triangle du Brexit (cf. G 5). Il a comparé ces options avec les solutions choisies par la Suisse et d’autres pays. Dans ses objectifs de négociation publiés durant l’été 2018 (« White Paper »), le gouvernement britannique recherche un accès relativement étendu au marché intérieur des biens et des services de l’UE, et en même temps un degré d’intégration relativement limité sur le marché de l’emploi (libre circulation des personnes) et de faibles contributions nettes au budget de l’UE. Le degré d’intégration recherché sur le marché des biens et des services dépasse le degré d’intégration actuel de la Suisse dans ce domaine ; en revanche, l’intégration recherchée sur le marché de l’emploi est nettement moindre. L’UE, en revanche, insiste sur l’indivisibilité de ses quatre libertés fondamentales (libre circulation des personnes, des marchandises, des services et du capital) et, dans les négociations, utilise l’accès à son marché intérieur comme une monnaie d’échange, afin d’imposer une mobilité des personnes aussi élevée que possible.
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