La part des entreprises actives en R&D en Suisse augmente pour la première fois en 20 ans

Le paysage de la recherche en Suisse se diversifie à nouveau. Les petites entreprises et celles actives dans les services modernes en particulier, se remettent à faire plus de R&D (recherche et développement). L’étendue des entreprises innovantes rend l'économie suisse plus résiliente face aux crises telles que celle que nous avons connu avec le COVID-19.

La concentration des dépenses de R&D dans l'ensemble de l'économie diminue

Pour la première fois en 20 ans, la part des entreprises ayant des activités de R&D a augmenté en Suisse (cf. Graphique G 7). L'augmentation de 12,6% à 16,3% est considérable en comparaison historique. La tendance à la baisse, constatée depuis des années, de la part des entreprises ayant des activités de R&D est donc rompue. En parallèle, les dépenses de R&D en tant que part du chiffre d'affaires sont restées constantes à un niveau élevé de 3,7% au cours de la dernière période étudiée (2018-2020) (cf. Graphique G 8). La concentration des dépenses de R&D dans l'économie suisse a donc diminué. Alors que le nombre d'entreprises ayant des activités de R&D a augmenté, la part des dépenses de R&D dans le chiffre d'affaires est restée stable. L'augmentation de la part des entreprises actives en R&D est réjouissante d'un point de vue économique, car cela signifie que le domaine de la recherche en Suisse est vaste.

A l’heure actuelle, nous ne pouvons faire que des suppositions concernant les raisons de l'augmentation des activités de R&D. Des analyses plus approfondies montrent que ce sont surtout les entreprises non exportatrices, les entreprises détenues par des étrangers et les entreprises appartenant à un groupe d'entreprises qui ont augmenté leurs activités de R&D. L'introduction de la patent box en Suisse en 2020 ainsi que la déductibilité fiscale accrue des dépenses de R&D dans certains cantons pourraient avoir joué un rôle important. Seules les prochaines enquêtes permettront de déterminer si l'augmentation des activités de R&D s'avère durable et quelles en sont les raisons exactes.

Différences dans les activités de R&D entre les sous-secteurs et les classes de taille des entreprises

L'augmentation de la part des entreprises ayant des activités de R&D se reflète également dans les sous-secteurs (cf. Graphique G 9). Les entreprises de l'industrie de basse technologie et des services traditionnels enregistrent respectivement une hausse de 2 et 4 points de pourcentage. L'augmentation est particulièrement forte dans les services modernes, comme les télécommunications, les médias, les technologies de l'information ou les banques et assurances, où la part est passée de 15% à plus de 20%. Ce n'est que dans l'industrie de haute technologie que la part des entreprises ayant des activités de R&D a diminué, passant de 48% à 45%. Cependant, l'industrie de haute technologie a toujours, et de loin, la part la plus élevée d'entreprises ayant des activités de R&D parmi tous les sous-secteurs.

La raison pour laquelle la part des activités de R&D a encore diminué dans les entreprises de haute technologie n'est pas claire. Les évaluations descriptives montrent que l'environnement de marché dans l'industrie de haute technologie n'a pas beaucoup changé au cours des deux dernières années. La seule différence notable est la baisse du taux d'exportation, causée par une concurrence plus intense, mais peut-être aussi par les turbulences sur les marchés internationaux suite à la pandémie de COVID-19. Cela pourrait avoir incité certaines entreprises de l'industrie de haute technologie à utiliser davantage leurs connaissances pour l'innovation incrémentale et à moins investir dans le développement coûteux de nouvelles connaissances - sous forme de R&D -, ce qui expliquerait l'abandon de la R&D par certaines entreprises.

Si l'on considère la part des entreprises ayant des activités de R&D par classe de taille, ce sont surtout les petites entreprises de moins de 50 employés qui montrent une forte augmentation dans la période la plus récente (cf. Graphique G 10). L'augmentation de 10% à 15% est même plus marquée que celle de l'ensemble de l'économie. Les deux catégories de moyennes entreprises présentent des fluctuations plus importantes sur l'ensemble de la période et n'enregistrent pas de hausse nette sur la période la plus récente. Dans les grandes entreprises de plus de 250 employés, la part des entreprises ayant des activités de R&D est restée plus ou moins stable depuis 2003-2005. Elle a toujours oscillé entre 40% et 50%. Dans la période la plus récente, la part de 39% se situe dans la limite inférieure de cette fourchette historique. Toutefois, la part des entreprises ayant des activités de R&D est toujours presque trois fois plus élevée dans les grandes entreprises de plus de 250 employés que dans les petites entreprises de moins de 50 employés.

Les activités de R&D renforcent la résistance à la pandémie de COVID-19

La pandémie de COVID-19 a eu un impact significatif sur presque tous les secteurs de l'économie. Le graphique G 11 et le graphique G 12 montrent la manière dont l'existence d'activités de R&D et le fait d'être affecté par la pandémie de COVID-19 sont liés. Les avantages et les inconvénients qu'apportent les activités de R&D en rapport avec le COVID-19 ne sont pas clairs. Par exemple, les entreprises innovantes peuvent généralement réagir plus rapidement aux problèmes, mais elles sont plus dépendantes des événements sur les marchés internationaux en raison de leur orientation plus marquée vers l'exportation. Le graphique G 11 montre que les entreprises ayant des activités de R&D ont plus souvent rencontré des problèmes avec les clients et les fournisseurs internationaux. Ce n'est que dans le domaine des services que les entreprises ayant des activités de R&D ont fait état de moins de problèmes.

Avec le graphique 12, nous constatons que la situation s'inverse lorsque nous considérons les problèmes avec les clients et les fournisseurs nationaux. Les entreprises ayant des activités de R&D ont moins souvent fait état de problèmes liés au COVID-19. Les deux graphiques indiquent que les activités de R&D ont tendance à rendre les entreprises plus résilientes. Les entreprises actives en R&D ont rencontré moins de problèmes liés au COVID-19 sur le marché national. Cependant, comme les entreprises actives en R&D exportent plus souvent, elles sont plus exposées aux difficultés causées par le COVID-19 sur les marchés internationaux.

Le fait d'être affecté par la pandémie n'est toutefois qu'un aspect de la résilience. La vitesse de récupération est à cet égard tout aussi importante. Des études à venir montreront si les entreprises innovantes et actives dans la R&D ont également pu se remettre plus rapidement de la crise provoquée par le COVID-19. Les premiers signes en ce sens apparaissent déjà. A titre d’exemple, une étude menée auprès d'entreprises innovantes (cf. KOF Bulletin n° 164, 2022 « Les activités d'innovation des entreprises suisses pendant la crise Corona ») a montré que leur degré de numérisation avait augmenté en raison de la crise. En outre, les entreprises innovantes ont souvent réorienté leurs modèles commerciaux. Ces deux éléments sont le signe de mesures structurelles qui devraient avoir une influence positive sur la productivité des entreprises à l'avenir

L'étude « Innovation et numérisation dans l'économie privée suisse - Résultats de l'enquête sur l'innovation 2020 », sur laquelle se base cet article, est disponible ici.

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Lecturer at the Department of Management, Technology, and Economics
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