Le travail à temps partiel renforce-t-il l’inégalité entre les sexes sur le marché de l'emploi?

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Le temps partiel chez les femmes facilite leur intégration sur le marché de l'emploi mais a des inconvénients importants: il est un obstacle à la carrière et renforce l’inégalité entre les sexes. Les femmes optent souvent pour le temps partiel, à cause de la garde des enfants. Une meilleure offre en structures d'accueil des enfants et une augmentation des postes de direction à temps partiel pourraient atténuer le problème.

Teilzeit Arbeit meist bei Frauen
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Le travail à temps partiel très répandu chez les femmes

La part des actifs travaillant à temps partiel s’est accrue de 12% à 35% entre 1970 et 2016. En Suisse, la tendance s’observe aussi bien chez les hommes que chez les femmes, mais les différences sont considérables : 16% chez les hommes, 57% chez les femmes. Parmi les pays membres de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), seuls les Pays-Bas présentent une part plus élevée de femmes employées à temps partiel. Chez les hommes, en revanche, la Suisse se situe juste au-dessus de la moyenne de l’OCDE.

Le travail à temps partiel, obstacle à la carrière

La tendance à opter pour un emploi à temps partiel répond souvent à un souhait, car elle favorise la conciliation de la famille et du travail et contribue à l’intégration des femmes sur le marché du travail. Pourtant, le travail à temps partiel peut avoir des répercussions négatives. Ainsi, il peut faire obstacle à la carrière, si les postes de direction sont liés à des emplois à plein temps. Une estimation descriptive de l’Enquête suisse sur la population (ESPA) conforte cette crainte : les membres de la direction des petites et moyennes entreprises occupent à 87% un poste à plein temps. Seuls 2% d’entre eux ont un emploi à moins de 50%. Il en va de même chez les cadres supérieurs hors postes de direction. En même temps, les données révèlent une nette sous-représentation des femmes dans les fonctions dirigeantes. Il convient de se demander dans quelle mesure le travail à temps partiel explique cette sous-représentation.

Le travail à temps partiel renforce l’inégalité entre les sexes

Pour répondre à cette question, il s’est agi d’évaluer l’influence du sexe sur la probabilité de devenir membre de la direction d’une entreprise (tableau T 1). En moyenne, 11,6% des hommes, mais seulement 5,2% des femmes sont membres d’une direction d’entreprise. La différence s’élève donc à 6,4 points de pourcentage (modèle 1). Si l’on compare les hommes et les femmes du même âge, ayant le même degré de formation, la même nationalité, la même durée d’appartenance à l’entreprise et opérant dans le même secteur d’activité, la différence moyenne s’élève à 5 points de pourcentage (modèle 2). Une partie de l’écart initial s’explique donc par les caractéristiques citées. Si l’on ajoute au modèle le taux d’occupation comme variable supplémentaire, la différence au détriment des femmes s’accroît de 2,2 points de pourcentage pour atteindre 2,8% (modèle 3). La sous-représentation des femmes dans les fonctions dirigeantes s’explique donc pour un tiers, par la forte proportion féminine dans les emplois à temps partiel.

Les enfants, principale raison du choix d’un emploi à temps partiel

Pourquoi tant de femmes travaillent-elles à temps partiel ? Dans le cadre de l’ESPA, un tiers des femmes interrogées indiquent la garde des enfants comme raison principale et 16%, d’autres facteurs familiaux. L’importance des enfants dans le choix d’un travail à temps partiel chez les femmes est illustrée par le graphique G 1, qui présente le taux moyen d’occupation en fonction du sexe et de la taille du ménage, si l’on compare des personnes du même âge, ayant le même degré de formation, la même nationalité et opérant dans le même secteur d’activité. Le taux d’occupation des hommes n’est pas influencé (si ce n’est positivement) par la présence d’autres membres dans le ménage. Celui des femmes – initialement au même niveau que celui des hommes – diminue en revanche de 85% (dans un ménage d’une personne) à 45% (dans un ménage de cinq personnes).

Manque de structures d’accueil des enfants (à des prix abordables)

Le fait que ce soit surtout les femmes qui réduisent leur temps de travail à la naissance des enfants est lié à la définition des rôles traditionnels. Tant que les femmes gagnent moins que les hommes, une telle décision s’avère également rationnelle du point de vue financier. La nécessité de se retirer du marché au profit des enfants est justifiée par bon nombre des personnes interrogées dans le cadre de l’ESPA en raison du manque de structures d’accueil (abordables). Une comparaison avec d’autres pays confirme que la Suisse pourrait en faire davantage à cet égard. Les familles sont fortement grevées par les dépenses liées à la garde des enfants, car la participation financière des pouvoirs publics y est inférieure à la moyenne.

Conclusion

Pour qu’il y ait un véritable choix possible par rapport au taux d’occupation, il faut remplir un certain nombre de conditions préalables. Il importe de créer des conditions permettant aux employés à plein temps de concilier famille et travail. À cet égard, les pouvoirs publics devraient fournir une infrastructure d’accueil des enfants étendue et abordable. Par ailleurs, il conviendrait de faciliter l’accès aux postes de direction pour les personnes employées à temps partiel. Les emplois à temps partiel devraient être courants au niveau des fonctions dirigeantes – aussi bien pour les femmes que pour les hommes. Pour promouvoir l’égalité des sexes, il faudrait en outre remettre en question la répartition classique des rôles par rapport aux tâches ménagères et éducatives.

Contact

Dr. Daniel Kopp
Lecturer at the Department of Management, Technology, and Economics
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